Les deux tomes de la série L’Année des quatre empereurs,parus en 2019 et 2023, sont à lire dans l’ordre puisqu’ils correspondent à une avancée chronologique dans l’Histoire romaine : le tome 1 (centré sur Galba et Vindex) se déroule en 68 apr. J.‑C., comme son titre l’indique clairement tout en offrant un clin d’œil à une autre période d’agitation politique 1900 ans plus tard, et le tome 2 (centré sur Othon) entre janvier et avril 69. L’intrigue du prochain tome à paraître (centré sur Vitellius et Vespasien), Les Flammes du Capitole, racontera la suite des événements de cette année 69 très particulière qui donne son nom au titre de la série.
En effet, après la chute de Néron et son suicide, commence une période d’instabilité politique inédite avec la succession de généraux désignés comme empereurs par leurs armées, deux l’étant parfois en même temps dans deux endroits différents puisque les factions s’opposaient. On assiste aussi à l’émergence d’une force de contestation en Gaule à propos de la manière même à appliquer pour diriger l’Empire :
Sous Néron apparaît une opinion politique provinciale qui s’intègre dans l’Empire, dont elle commence à assumer les responsabilités. Mais en est-il de plus importante que le choix de l’empereur lui-même ? Avant même la mort de Néron (68), la Gaule se révolte et, par son option en faveur de Vindex et de l’Empire libéral, elle exprime le droit de la province à participer à cette élection. Par la suite, les guerres civiles, au cours desquelles, entre 68 et 70, s’affrontent les généraux candidats à l’Empire (Galba, Othon, Vitellius, puis Vespasien), accentuent la coupure entre les civils et les militaires, entre l’aristocratie sénatoriale et les provinces de l’intérieur, d’une part, l’armée et la zone limitrophe des régions frontières, d’autre part. Les militaires sont partisans d’un régime totalitaire et dictatorial, les civils d’un pouvoir libéral et respectueux des franchises des cités et des prérogatives des notables. Cette opposition va dominer toute la vie politique de la Gaule et persistera jusqu’au Bas-Empire[1].
Le tome 1 s’intéresse ainsi à la toute fin du règne de Néron, suite à la révolte de Vindex, le personnage même qui est visible au premier plan de la Fig. 1. Le tome 2 s’ouvre sur l’assassinat de Galba en plein forum et l’accession au pouvoir suprême d’Othon. Et dans les deux tomes, Vespasien, aidé de son frère (préfet de Rome) et de son fils Titus, commence à avancer subrepticement ses pions pour accéder à la tête de l’empire, à l’aide du personnage principal : Quintus Aper, dessiné au deuxième plan de la couverture du premier tome (Fig. 1). Tel est du moins le nom d’emprunt sous lequel il apparaît le plus souvent mais en réalité il se nomme Marcus Manilius Secundus, comme on l’apprend assez vite de la bouche même du général Vespasien (Fig. 3).
Fig. 1-2.- Couvertures des deux premiers tomes de la série L’Année des quatre empereurs © S. Luccisano & C. Ansar – GALLIA VETVS 2019
Les deux albums comportent une page indiquant, pour le premier tome, seulement les personnages réels, qui sont succinctement présentés avant la première page de la BD, et pour le deuxième est ajoutée l’indication que Quintus Aper et Columba sont des « héros fictifs » (p. 51) et la page de synthèse prend cette fois place après la dernière planche de la BD. Dans les deux cas, on a au tout début de l’album le texte de spécialistes d’Histoire romaine (Yann Le Bohec pour le t. 1 et Jean-Claude Golvin pour t. 2), validant le sérieux du travail fait par les auteurs sur cette série.
Fig. 3.- Marcus Manilius devient Quintus Aper sur décision de Vespasien (L’Année des quatre empereurs. Tome 1. Mai 68, p. 29)
© S. Luccisano & C. Ansar – GALLIA VETVS 2019
Des chroniques sur les bandes dessinées en lien avec l’Antiquité sous la plume de Julie Gallego, agrégée de grammaire et maîtresse de conférences de latin à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour.
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